jeudi 15 avril 2010

L'instant T de la page que l'on tourne

Ca y est, la dernière patiente a passé la porte et aucun autre patient ne la passera pour moi dans ce bureau. La légère nausée revient. Comme à son arrivée.
Pour la dernière fois remplir la remise de chèques.
Pour la dernière fois fermer le dossier, ranger les dossiers dans le double trieur.
Pour la dernière fois regarder la pièce intacte.
(photo plus tard, vous n'aurez qu'à revenir ! ;o) )

Tiens, ma collègue qui finissait à la même heure que moi est partie. Sans me dire au revoir. Celle qui "ne mélange pas le personnel et le professionnel". Celle qui ne se libèrera pas pour mon petit pot d'au-revoir parce qu'elle a un patient à cette heure là cette semaine là. Elle est cohérente. On a pourtant bien travaillé côte à côte. Je sais que je manquerai aux 3 autres, c'est déjà ça.

Et commencer à vider le bureau, à trier son contenu, vider, vider, remplir la poubelle, réunir toute la papeterie inutilisée, les courriers personnels.
Décrocher les tableaux, le poster préféré, et le calendrier de Titouan Lamazou.
Enfourner dans un sac la petite décoration et les éléments de bureau, la fameuse boîte de mouchoir, le bambou offert par la précédente patiente, l'orchidée de bonne compagnie.

Plier le tapis, ranger le set d'écriture dans le tiroir surprenant de vide.
Enfin éteindre et partir.

La prochaine fois ça sera en laissant une pièce totalement vide.

L'émotion avortée dans la voiture ne s'est pas libérée à l'arrivée à la maison.

Et belle-maman, qui a apporté une aide précieuse cette semaine auprès des enfants, me saoûle ce soir avec les histoires de santé de la vieille tante alors que je suis plongée dans mon ordi à vous raconter ça.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Je lis ce passage avec une émotion certaine, car c'est ce qui m'attend à la fin de l'année.
La différence c'est que ce moment me sera imposé car fermeture d'un établissement...
Je commence déjà à trier, jeter et je redoute ce moment de la pièce vide. J'appréhende la séparation avec les patients (je ne fais pas le même métier que le votre mais suis dans le social)
Bravo pour votre courage (pas top pour votre collègue, sous couvert de ne pas mélanger les genres, elle aurait quand même pu faire un petit effort...)
Bien amicalement .
Marie

Tili a dit…

Quand je suis partie, j'ai fait une grande fête et un petit discours.
Un discours un peu particulier, un discours d'adieu où il était question de maladie et d'espoir. Et je l'ai conclu par ces mots que je t'offre aussi...

"Si vous avez des rêves, donnez vous les moyens de les accomplir, quitte à les changer un peu pour qu’ils soient réalisables. "

"...Et pour ceux d’entre vous qui auront le malheur de rencontrer la maladie, il y a en a forcément, il y en a tellement, je vous offre un petit mot d’espoir dont vous vous souviendrez peut être quand votre monde s’écroulera. Le voici, c’est ma conclusion.
“ Si tout votre monde s’écroule, considérez la chance que vous avez peut être de le reconstruire plus beau qu’avant”...

bisous
tili

Claire a dit…

tant pis pour les cons en tout genre. Elle a peut-être besoin d'un bon psy. Bon, elle était trop facile à faire celle-là. On cache parfois ses émotions derrière bien des façades.
Une porte se ferme, une autre s'ouvre et on est là pour l'ouvrir avec toi.
Bisous tout plein

telle a dit…

Ce qu'a écrit et dit Tili est fort beau, de réinventer sa vie pour qu'elle soit mieux encore... et ça tu en es capable.

Courage pour ces moments de nostalgie. Bises !